C'est l'hiver ♥ [Libre]

par Invité Dim 4 Jan - 20:48

– …’fait froid, siffla Rachel entre ses dents, pour elle-même.

Evidemment, qu’il faisait froid. Mais, et en toute conscience que ce fut inutile, la jeune fille se le rappelait à voix haute,comme pour contrer ce vent glacial qui l’engouffrait sans prévenir. Mais cela ne marchait pas.
Le souffle hoquetant, les narines à la fois engourdies et douloureuses par l’air ambiant, elle resserrait l’emprise de ses bras croisés sur ses épaules, geste qui lui déclencha un énième frisson, accompagné d’un reniflement pour le moins grossier.
Quelle idée, de passer à l’hiver…D’autant plus que la neige n’évoquait, pour elle, mis à part un souvenir très, très lointain, une vision virtuelle presque inconnue. Les plaisirs de la neige, l’enthousiasme enfantin, tout ça, c’était passé. Elle le voyait à la télé, mais nulle part ailleurs.

Après avoir reniflé la goutte qui lui pendait au nez, elle leva la tête un instant, mais ne pouvant observer qu’un ciel gris uniforme, elle la refourra dans son écharpe en poussant un soupir, mastiquant son chewing-gum avec hargne.
Son regard vide se dirigea, à plusieurs reprises, vers les autres collégiens. Certains souffraient du froid autant qu’elle, d’autres semblaient le supporter à merveille. Ces derniers l’étonnaient. Comment était-il possible de parvenir à ignorer l’hiver à ce point ? Ce devaient être des surhommes, dôtés d’une peau épaisse comme deux, avec la sensibilité du roc. Elle les enviait.
Elle jeta un coup d’œil à sa propre tenue. Une veste en jean plutôt fine recouvrait son uniforme, en guise de manteau. Maudit soit le crétin qui obligea le port de jupe ridiculement courte, et tout le reste. Ses poings se resserrèrent, jusqu’à pincer à la façon d’une brute sa propre chair, à travers ses habits ; la douleur lui ferait peut-être oublier ces courants d’air glaciaux, dignes d’une torture divine.
Appuyée contre le mur, elle hésita un instant à quitter sa place déjà chauffée pour s’accroupir, se recroqueviller sur elle-même ; ç’aurait été synonyme de « subir le-froid-encore-assez-longtemps-pour-que-sa-propre-chaleur-corporelle-en-ait raison », puis, finalement, elle choisit de s’exécuter, réprimant ses plaintes intérieures.
Avec amertume, elle se rappela s’être levée, sous la menace des « drings » de son réveil, le matin même, dans un lit douillet, confortable, et enveloppée d’une chaleur qu’elle regrettait, à présent. Bien que ce fut à peine une heure plus tôt, cette heure passait pour une éternité dans l’esprit de la jeune fille. Elle aurait pu rester chez elle, feindre d’être malade, quitte à ingurgiter les médicaments répugnants que sa naïve mère gardait au cas-où dans une armoire placée en hauteur dans la salle-de-bain. Cela lui était arrivé déjà plusieurs fois. Abuser de l’attention de sa mère était presque quotidien, et « culpabiliser » ne faisait pas partie de son
vocabulaire. Or, cette fois-ci, elle avait eu le malheur d’avoir pris son courage à deux mains, de s’être hissée hors de son lit en pleine forme –façon de parler, on peut pas être en pleine forme à 7h du mat, du moins pas elle–, d’avoir gobé ses cornflakes, avoir fait sa toilette matinale comme à son habitude, et d’avoir entamé à pied le chemin jusqu’à son collège, s’imaginant que la température, déjà glaciale à
ce moment, n’était que passagère. Grave erreur, insensée idée ! Elle se retrouvait à présent, à l’instar de tous les autres, à subir le châtiment du ciel en grelottant, semblable à une pauvre loque que le vent aurait emportée trop loin de chez elle.

Dans un grognement de yéti congelé, elle décida de rester ici, à emmagasiner le peu de chaleur qu’elle pouvait, jusqu’à la dernière minute. Il était hors de question qu’elle franchisse la cour glacée pour devoir encore cailler, ne serait-ce que quelques minutes. C’était déjà trop.
Aussi, dans une pose d’enfant boudeur, elle observait les élèves regagner leur salle de cour respective, restant immobile, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que quelques uns.

par **Shion Yasuoka** Mer 7 Jan - 21:28

Pendant ce temps, Shion courait. Oui, elle courait par cette matinée d'hiver très froide et enneigée pendant que quatre-vingt-dix-neuf virgule neuf pour cent des élèves se contentaient de marcher, étant trop pris par l'air glacial pour pouvoir courir ne serait-ce qu'un peu. Shion n'était-elle pas plutôt frileuse? En fait, si, elle l'était. Mais là, elle était bien couverte. Bien sûr, elle portait l'uniforme habituel de l'Académie Seiyo avec cette jupe trop courte pour l'hiver, d'ailleurs on pourrait se demander au passage pourquoi les filles n'avaient pas droit à des jupes plus longues, au moins pour l'hiver. Aujourd'hui, pour se protéger du froid, Shion portait également des collants, une écharpe et des gants rouges et un grand manteau beige. Son visage et ses oreilles avaient pris une teinte un peu rosée à cause du froid mais elle n'était pas encore enrhumée. Et donc, couverte ainsi, elle courait, parce qu'elle était toujours enthousiaste quand elle se rendait à l'école, parce qu'elle voulait rapidement retrouver ses copines et parce qu'en courant, elle réduirait le temps passé dans le froid. Heureusement, les rues avaient été déblayées et il n'y avait pas de verglas, Shion n'aurait pas aimé devoir faire du patinage (pas sans patins en tout cas). Bref elle courait, de bonne humeur et arriva rapidement en vue de l'Académie. Elle arpenta la pente montante qui menait à l'entrée de l'établissement, saluant au passage les quelques camarades de classes qu'elle croisait. Aujourd'hui, elle était un peu en retard par rapport à d'habitude, eh oui, cela lui arrivait à elle aussi. Mais elle n'était pas complètement en retard, elle arrivait simplement à peu près au moment ou le flux d'élèves commençait à diminuer.

Elle n'était plus qu'à quelques mètres de l'entrée de l'Académie lorsqu'elle remarqua la présence d'une "boule" bleue adossée contre le mur. Bon en fait, ce n'était pas une boule mais une jeune fille qui portait l'uniforme de Seiyo ainsi qu'une veste en jean (d'où la couleur bleue). Sauf que cette élève était complètement recroquevillée sur elle-même, tremblotante mais totalement immobile. Shion la vit lever la tête un instant. Elle vit un joli visage apparemment très atteint par le froid et coiffé d'une chevelure rousse similaire à celle de Shion. Encore un nouveau visage à Seiyo. Cette jeune fille semblait avoir adopté la méthode de l'immobilisme pour mener une lutte vaine contre le froid. Voyant cela, Shion enleva son cartable du dos, l'ouvrit et en sortit son très fidèle carnet ainsi que son tout aussi fidèle stylo, le tout en moins de trois secondes. Eh oui, Shion était passé maître en "sortage de Carnet-kun du cartable". Elle était aussi capable d'écrire plus vite que son ombre (du moment que ce n'étaient pas des phrases trop longues). Et donc, tout en courant, elle écrivit sur son carnet. Arrivée devant la jeune fille, elle s'arrêta juste le temps d'attraper sa main et continua de courir à travers la cour en direction du bâtiment principal. Avec son autre main, elle montra le carnet à la jeune fille en lui adressant un sourire chaleureux.

Carnet-kun a écrit:Si tu restes plantée là, tu vas finir en bonhomme de neige.

par Invité Jeu 8 Jan - 23:28

Lorsque, l'interrompant dans ses réflexions -qui se résumaient d'ailleurs à de bougonnements incessants- une ombre se dressa au dessus d'elle, que la perspective rendait gigantesque, ombre qui occupait tout son champ de vision et lui aurait caché le soleil s'il y en avait eu, Rachel daigna enfin lever la tête. D'abord méfiante, elle détailla la nouvelle venu d'un œil peu amène, le regard noir afin d'éviter les rencontres inutiles. De taille plutôt petite, cheveux roux coupés relativement court, et la poitrine se soulevant et se baissant à allure rapide mais régulière, Rachel en déduit qu'elle venait de courir une distance plus ou moins longue, selon ses capacités physiques.
Alors enfin, son attention se porta sur ce qu'elle tenait.
Un cahier.
Son regard ne se posa dessus qu'un simple instant, avant de replonger dans le bleu [Je suppose.] des yeux de la jeune fille. Pourquoi s'était-elle approchée de Rachel, pauvre enfant martyre retirée dans un coin de la cour, au lieu de rejoindre les autres élèves et regagner l'établissement en toute sûreté ? Pourquoi avait-il fallu qu'une fille s'intéresse à elle, alors qu'elle paraissait sous sa plus piteuse forme ? "Pour ce qui est d'elle, tout à fait inintéressante.", ce fut la phrase qui s'ancra en son esprit, jusqu'à paraître scotchée sur le front de l'intéressée, bien que consciente qu'elle n'eut pas la moindre connaissance de ce qu'elle pensait d'elle. Pour qu'elle le sache, car que ses impressions sur les autres soient passées sous silence, comme si elle était obligée de se cacher pour se faire des opinions d'untel lui était tout à fait inconcevable, elle afficha ses pensées à haute voix en poussant un grognement des plus élégants, assez fort pour être entendue.

Tout cela en l'espace d'un instant.

La pression soudaine qu'elle ressentit sur son poignet la fit, en un premier temps, tressauter, ce qui dissipa en une seconde l'aspect sombre, hostile qu'elle avait tenté de faire ressortir en elle, qui aurait suffi à faire rebrousser chemin à quiconque, pour peu qu'il ne soit pas trop déterminé à s'approcher d'elle.
Elle fut violemment tirée en avant, et, contrainte, consentit à se lever, en évitant de justesse la chute en plaçant un pied adroit devant elle. Une telle brutalité l'étonna de la part d'un si petit gabarit, et son instant d'inattention lui valut de trébucher une nouvelle fois sur la surface tout à fait plane, bien que légèrement granuleuse, du sol en goudron, lorsque Shion l'entraîna dans une course, alors que Rachel n'aurait souhaité rien d'autre que de rester assise à contempler ses genoux, mis à part un peu de chaleur.
C'est seulement à cet instant que la jeune fille se rendit compte que, dans l'élan de l'action, la température lui avait totalement quitté l'esprit, malgré le fait qu'elle l'avait habité plusieurs longues et glacées minutes auparavant.
Elle haussa un sourcil. Cette fille semblait dotée d'un pouvoir magique, ou quelque chose comme ça, qui devait ôter les préoccupations emmêlées du cerveau des gens. Probablement. Néanmoins, elle en avait ramené une autre : son soucis présent était de savoir quand-est-ce que cette fille miraculeuse allait enfin lâcher de son gant froid sa main nue et engourdie.
L'exercice physique manquait cruellement à Rachel, et elle constata sans surprise que son cœur s'affolait déjà, tandis qu'elle tentait d'étouffer ses halètements, pour tenter de paraître plus forte. Manquant d'étouffer sa propre personne, elle abandonna dès la première tentative, et laissa passer à regret cette vision d'elle si faible.
Le vent lui battait les joues, et faisait flotter ses cheveux derrière elle ; son visage ainsi proie au fouet de l'air, elle grimaça sans retenue. L'idée lui vint alors, si cette fille inconnue sortie de nulle part persistait à la faire courir contre son gré, de lui faire lâcher prise. Un bon coup sec romprait les liens, du moins si son poignet transi le lui permettrait.
Alors qu'elle s'apprêtait à exécuter ses pensées, la fille se décida enfin à lui témoigner sa conscience, prouvant alors qu'elle n'était pas qu'un automate, en soulevant, de manière à le rendre bien visible, son fameux carnet entrevu plus tôt. Cette fois ouvert, il laissait apparaître -il lui fallut tout de même quelques secondes, avant de déchiffrer quelque chose dans ces tressautements incessants dûs à la course qu'elles effectuaient- une phrase.

"Si tu restes plantée là, tu vas finir en bonhomme de neige."

Etonnée de voir que de si sauvages manières étaient nées de vertus nobles, telles que la charité, et la pitié qu'éprouve l'homme au grand coeur devant la misère d'un pauvre roturier congelé par les déchaînements climatiques, toute pensée de rebellion qui hanta jadis son coeur, telle que le violent et sec coup qu'elle aurait désiré porter à la fille pour se dégager de sa prise, se dissipèrent. C'est ainsi que, lorsque Shion se retourna pour adresser à la jeune fille un troublant sourire d'une sincérité ébranlante, elle ne s'aperçut nullement de la moue enragée-boudeuse que cette dernière affichait à peine un instant plus tôt.
Une fois remise de ses émotions, Rachel ne put réprimer un sourire, qui se transforma vite en éclat de rire, tandis que leur course ralentissait de rythmes, alors qu'elles franchissaient le seuil de l'entrée du bâtiment. Alors seulement, elle remua le poignet, signe destiné à Shion pour que cette dernière la lâche.

- Pas faux... Mais tout de même, je préférais rester à croupir dans mon coin, fit-elle en guise de réponse à la remarque de Carnet-kun, bien que sans certitude que Shion fasse le rapprochement entre les deux. Elle avait répondu bien tard, après tout, mais le froid avait paralysé ses lèvres, et surtout endormi sa réflexion.

Tandis qu'elle expliquait ça, elle essuya négligemment le coin de sa bouche du revers de la manche. Flocon ou filet de salive, ce qui constituait la tâche à peine visible qui trônait à présent sur sa veste était de nature inconnue.
Inutile de préciser que, maintenant dans le bâtiment, l'ambiance de travail aurait raison de sa paresse, et que le choix qui s'était présenté à elle avant sa venue -à savoir aller en cours ou sécher- était vite réglé, ce qui lui tira un soupir.
Un sourire simple aux lèvres, sans vraiment de signification, elle détailla une seconde fois la jeune fille, d'un oeil plus objectif, cette fois. Etrangement, elle remarqua que, loin d'être inintéressante, la fille se révélait même plutôt jolie. D'une douceur innocente, la peau pâle l'identifiant comme un être frêle, et pourtant, non pas agressive, mais familière, confiante dans ses propos, du moins ceux inscrits dans son carnet.

par **Shion Yasuoka** Ven 9 Jan - 22:13

Elle avait ri. La jeune fille avait ri. Tant mieux. C'était toujours un bon signe quand quelqu'un se mettait à rire, sauf quand c'est le grand méchant d'une histoire. Mais là, il n'y avait pas de grand méchant alors on pouvait dire à cous sûr que c'était un bon signe. C'était le signe que Shion avait réussi à apporter un peu de bonne humeur à quelqu'un. Et puisqu'elle avait réussi à apporter un peu de bonne humeur à quelqu'un, le reste de sa journée se passerait très bien. C'étaient là les prévisions de la journée, façon Shion. Bon, en même temps, des mauvaises journées, Shion n'en avait pas connu des masses du haut de ses quatorze petites années de vie. Était-ce à dire qu'elle apportait de la bonne humeur à une personne (presque) tous les jours?...

Après quelques petites minutes de course main dans la main, ou plutôt poignet dans la main, les deux élèves arrivèrent dans le hall du bâtiment principal. Une fois les portes refermées, Shion lâcha le poignet de l'autre jeune fille et leva les bras au ciel comme si elle avait couru le marathon aux Jeux Olympiques et qu'elle venait de passer la ligne d'arrivée. Elle se secoua ensuite tout le corps un peu comme le ferait un chien qui aurait plongé dans la piscine et viendrait tout juste d'en sortir ou alors qui aurait tout simplement passé un moment dehors sous cette neige qui tombait. Pourquoi cette comparaison, me demanderez-vous? Eh bien parce que c'est ce qu'avait fait Kin (le chien de Shion) ce matin après que Otousan soit allé le promener et que, peut-être inconsciemment, Shion avait eu envie de l'imiter. Après tout, cela semblait faire du bien. Et il fallait le reconnaitre, cela faisait vraiment du bien. Shion se débarrassait de la neige qui restait sur elle et évacuait en même temps les résidus de "fait froid!", le tout en une seule action. Y avait pas à dire, les méthodes des animaux, fallait en prendre de la graine.

Bref, ceci fait, Shion se tourna vers celle qu'elle avait entrainée dans sa course, lui assénant son attaque "sourire d'une jeune fille de bonne humeur", apparaissant pas vraiment essoufflée mais avec une respiration légèrement accélérée. Il lui semblait que cette jeune fille avait dit quelque chose à propos de préférer rester dans son coin, ce à quoi Shion répliqua en inclinant la tête sur le coté en clignant des yeux, l'air de dire "Ah bon? Pourquoi?" sur un ton curieux (limite comme Mindy, la p'tite fille dans les Animaniacs).

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